Premières aventures d’Ellaus et Zebulon

Journal de Zébulon Brockenbrick

<< 5e lune de l’an 58 depuis ma naissance.

J’ai établi mon camp de base à Pointe-Sable. Cette agréable bourgade est située à proximité de mes zones de fouilles ; non seulement c’est pratique mais de plus l’éminent Brodert Quinck y réside et je sais qu’il a toujours pour moi quelques judicieux conseils en matière d’archéologie thassilonnienne.

Là, j’ai sympathisé avec Ellaüs, une éclaireuse qui connait la région et semble habile de son arc. Elle sait que j’ai une famille nombreuse à nourrir et compatit à mes préoccupations financières.

Je lui ai donc proposé de se joindre à moi pour traquer Tordor le Rouge. On dit que c’est un brigand doué d’une force surnaturelle. Il y a une prime de 200 PO pour sa capture car les marchands sont excédés de ses pillages et de ses vilénies. La capitaine de la garde m’a également parlé de Sulfur le Siffleur, un escroc élégant et charmeur qui se fait passer pour un guide afin d’égarer l’innocent voyageur en pleine nature sauvage. Il abuse alors de la détresse de ses victimes pour mieux les détrousser. Malheureusement personne ne peut fournir de description fiable de Sulfur. Ce malfrat semble être passé maître dans l’art du déguisement. Du coup, la prime pour sa capture s’élève à 250 PO.

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Ellaüs n’a pas fait d’études mais elle a du bon sens. Elle me propose de rendre visite à Madame Vachti pour demander à la chamane si ses visions pourraient nous fournir un indice afin de trouver où se cache Tordor. L’idée est plaisante. Je n’y crois guère mais j’avoue que je suis curieux de voir à l’œuvre une créature qui pratique spontanément la magie alors que moi j’ai passé des mois à transpirer sur d’antiques manuscrits elfiques avant de pouvoir lancer mon premier sort mineur.

Le rituel est haut en couleur. Ellaüs entre en transe et a des visions. Elle est visiblement bouleversée

mais reste discrète quant à cette expérience... Rien sur Tordor m’assure-t-elle. L’effet est sur moi plus modeste. Madame Vachti me glisse à l’oreille un conseil de devin qui me permettra d’échapper à la vindicte d’un futur ennemi. C’est toujours bon à prendre.

Au moment de payer les services de la chamane, Ellaüs et moi-même découvrons que nous avons été victimes de fripons qui ont escamoté nos subsides. On m’avait pourtant averti que la foule du marché cachait bon nombre de coupes-bourses, de faux-estropiés et autres malandrins. J’ai honte d’avoir été aussi facilement dupé et la colère me monte à la moustache.

Madame Vachti nous sort de l’embarras en nous missionnant pour enquêter sur les kobolds de Bois Grognon car « là où il y a des kobolds, il finit souvent par y avoir des dragons et je n’aimerais pas avoir de ce voisinage-là » nous dit-elle d’un air entendu. Elle souhaite en savoir plus sur une stèle mise en place par les kobolds. Cette pierre serait couverte de symboles que la chamane souhaite pouvoir étudier afin d’avoir une idée plus claire de la menace.

Nous partons donc vers le nord. Ellaüs ouvre la route d’un pas vif avec l’assurance des gens de piste. Confortablement assis sur Bernadette, ma chèvre de monte, nous trottinons à sa suite en assurant les arrières de l’éclaireuse. Le chemin est monotone, les rations fades et nous dormons dans l’humidité... dès la première nuit, je suis tout crotté et fourbu. Ah, si ma femme me voyait ainsi, j’entendrais parler du pays !

Mais Josette n’est malheureusement pas là et c’est plutôt une troupe de gobelins qui croisent notre route. Les affreux sont sept. Ils campent paisiblement près d’une source... enfin quand je dis paisiblement... leur sentinelle est en train de torturer un oiseau... ce sont des gobelins quoi !

Je me souviens d’avoir découvert un jour une magnifique fresque dans les ruines d’une villa thassilonnienne et d’avoir été affligé de découvrir que cette œuvre d’art avait été vandalisée par desgraffitis obscènes de gobelin. Cette engeance est une insulte à l’intelligence et une plaie pour l’archéologie.

Ellaüs est d’avis de les contourner et de poursuivre notre route mais j’arrive à la convaincre de mettre fin aux méfaits de ces créatures dénaturées. Nous attaquons et je prends un grand plaisir à carboniser ces pourritures. Ellaüs critique la brutalité de ma méthode. Elle me fait remarquer que le forgeron de Pointe-Sable paye un bon prix à qui lui ramène des oreilles de gobelins et que je viens de faire partir en fumée un joli pactole... las ! Je parviens tant bien que mal à sauver une paire d’oreilles.

Finalement nous entrons dans Bois Grognon. La stèle est là. Elle est couverte d’un long texte écrit dans la langue noire des profondeurs que je n’ai pas le temps de déchiffrer. En revanche, je réussis à retranscrire sur parchemin les cinq symboles de ce qui semble être une énigme. La stèle est enchantée et il y a une tablette de cire à l’endroit du sixième symbole qui n’attend plus qu’une inscription.

Nos investigations sont interrompues par l’arrivée d’une quinzaine d’orcs armés jusqu’aux dents.

Nous avons tout juste le temps de nous dissimuler dans les bosquets qu’ils sont déjà attroupés autour de la stèle. Ils débattent dans leur détestable langue gutturale et nous n’y comprenons goutte. Je suis tellement effrayé que j’en oublie d’utiliser mon sortilège de compréhension des langues. Toutefois, nous en entendons assez pour comprendre qu’il parle de dragon : « Drakkhür Drakkhür Drakkhür ! ». Ah leur noir parlé me donne la nausée !

Nous nous éclipsons discrètement et nous rentrons à Pointe-Sable faire notre rapport à Madame Vachti.